La Princesse aux Cheveux d’Or et l’Oiseau Fontaine

18 Oct. 2023 | Contes et Légendes de Féerie

Il était une fois, une princesse aux longs cheveux d’or qui se prénommait : Bouton de rose.

Bouton de rose, car sa peau était aussi fraîche et délicate que le plus pur pétale de rose blanche, ses joues étaient aussi rose que l’éclat de la plus belle des roses roses et ses lèvres aussi intenses que le plus rouge des boutons de rose rouge. Ses yeux d’un éclat émeraude, renvoyaient à la verdure qui forme l’écrin d’une rose. Sa beauté ne cessait de s’accroître au fil du temps et la douceur de son être également. Elle vivait dans la tour la plus haute d’un château et ne sortait que très rarement, à la tombée de la nuit seulement.

 

Tous les soirs, elle sortait se balader dans les jardins et s’asseyait près d’une fontaine. Elle se mettait alors à chanter une comptine, dont voici les premiers vers :

Brille, oiseau de nuit,

Brille, brille, mon ami

De ta présence je me languis,

matin et soir dans mon logis…

Brille, oiseau de nuit,

Brille, brille mon ami

De ton chant je me languis,

matin et soir dans mon logis…

Et c’est ainsi, qu’apparaissait sortant de la fontaine, le plus bel oiseau jamais perçu. Il n’était point bleu, blanc ou vert, ni même rouge ou encore orange, mais il était fait d’eau. D’une eau pure, lumineuse et scintillante et son chant de cristal tenait sans mal, les notes les plus hautes jamais perçues par l’homme. C’était l’esprit de la fontaine, qui se manifestait sous cette apparence.

L’oiseau magique, doué de chant et de parole, tenait compagnie à la princesse aux cheveux d’or.

Tous les soirs, ils parlaient, échangeaient sur leur journée, surtout l’oiseau qui avait la faculté de voyager d’entre les mondes. La princesse, Bouton de Rose, écoutait, subjuguée par la beauté des paysages qu’il se plaisait à lui décrire, étonnée par les coutumes des habitants de ces lointaines contrées, qu’elle ne connaissait pas. Elle posait mille questions auxquelles l’oiseau prenait plaisir à répondre.

Un jour, après avoir appelé l’oiseau fontaine, celui-ci lui annonça la venue d’un prince, dans le comté où le château du roi, son père, résidait.

J’aimerai tant voir le prince, soupira, alors la princesse. Je me sens bien seule tout la haut, dans ma tour. Que ne donnerais-je pas pour vagabonder et voir le monde comme toi, mon bel oiseau de lumière. Mais le roi, mon père, ne me laissera jamais partir. Il dit que je suis son bien le plus précieux et que rien sur cette terre ne saurait m’égaler.

Il est vrai, que le roi tenait la princesse en haute estime, à cause de sa longue chevelure d’or qui fournissait à tout le royaume plus de richesse qu’il n’en fut possible d’amasser en toute une vie. Tous les soirs et tout les matins, la princesse brossait sa précieuse chevelure et le valet de chambre, était chargé de ramasser un à un, les fins cheveux d’or tombés sur le sol et de les rapporter au souverain. 

Elle soupira de nouveau, de tristesse cette fois. Une larme coula le long de sa belle joue rose, semblable à une goutte de rosée.

L’oiseau qui la prit en pitié, lui dit alors :

– Il y a bien une solution mon enfant, pour que tu puisses sortir en cachette du royaume sans être vue et parcourir à ta guise le royaume tout entier sans être reconnue, mais pour ce faire une condition, une seule est requise. Tu devras traverser l’eau enchantée de la fontaine, t’y baigner nue, à minuit, où la lune sera pleine ! Cette eau agira comme un portail. Ton âme prendra alors l’apparence d’un animal, fait de la magie de l’eau de la fontaine. Ce qui te permettra de voyager entre les mondes. Cependant, il te faudra revenir avant que le soleil ne se lève, sinon tu seras prise au piège pour toujours de ton apparat de lumière et tu ne pourras jamais revenir sur Terre. Tu erreras à la façon d’un spectre, entre nos deux mondes, où jamais plus personne ne pourra ni te voir, ni t’entendre…

La princesse fort enthousiaste aux paroles de l’oiseau, accepta et attendit avec toute la patience qu’elle pu, chaque jour qui la séparait de la pleine lune, avec la même joie et exaltation dans le cœur que celle d’une enfant, une veillée de noël.

Pendant ce temps, le Prince qui voyageait dans les environs avait entendu parler dans les lointaines contrées, de la douceur et de la beauté légendaire de la princesse aux cheveux d’or. Il venait de loin pour la rencontrer et lui demander sa main. Il eut ouïe dire qu’elle vivait seule, isolée, dans la plus haute tour d’un château et que seul un cadeau qui fut assez rare et prodigieux, ferait consentir le roi son père à la laisser partir et que bon nombre se virent éconduire. 

Le prince se demanda quel cadeau était assez rare pour se montrer digne de recevoir en échange la main de sa douce fille. Ce devait être une princesse d’une qualité et d’une beauté fort incroyable, pour qu’un tel don fut ainsi demandé.

Certains dans le pays, y voyaient la malignerie du roi, qui aurait formulé cette demande, tout en sachant pertinemment, que personne ne serait en faveur d’y répondre…

Ce-ci faisant, plusieurs jours s’écoulèrent et la lune, une nuit, arriva enfin à une taille ronde et belle et la princesse, sur les conseils de l’oiseau, arriva à minuit devant la fontaine. L’eau claire et transparente scintillait de mille éclats et on pouvait voir au travers se refléter l’image circulaire de la lune.

La princesse ôta sa robe de pierreries, de rubans et de taffetas et plongea entièrement nue dans l’eau claire de la fontaine. Elle sentit sa douceur sur sa peau délicate et la trouva ni trop froide, ni trop chaude, juste comme il faut. S’immergeant jusqu’à la tête, la princesse ferma les yeux un instant, sombrant dans l’obscurité, puis lentement, une pâle lueur traversa ses paupières et elle vit de nombreuses ombres danser autour d’elle et sentit la fraîcheur d’une brise lui caresser la joue.

Quand elle rouvrit les yeux, elle se trouvait au milieu d’un bois, jusqu’à lors inconnu.

De grands arbres se dressaient et leurs feuillages d’un vert tendre laissait filtrer la lumière argentée de la lune. La princesse s’avança et s’aperçut que son corps était lui aussi bien différent de ce qu’elle avait connu. Elle était une biche désormais, toute d’or et de lumière vêtue, comme l’oiseau le lui avait dit. Elle avait aux pieds quatre sabots d’or et le pelage d’or également qui la recouvrait était aussi doux et fin que la soie la plus pure et la plus chère. Son aura brillait de mille éclat tout autour d’elle, semblable à l’eau de la fontaine. Lumineuse, elle décida d’arpenter le sentier.

La princesse se senti libre comme jamais elle ne l’avait été.

Les bois étaient bien plus beaux que lorsque l’oiseau les lui avait décrits, des jacinthes bleues, en tapissaient le sol. Les fleurs aux fées.

Des papillons aussi légers que l’air voletaient tout autour d’elle et des libellules venaient de ci, de là, semblant décrire un ballet aérien, digne des plus grands spectacles de danse, sous la lumière de l’astre argenté. Et les odeurs de sève et de terre mouillée lui parurent être ce qu’elle avait senti de meilleur dans sa vie, jusqu’ici.

Elle savoura ainsi encore chaque minute, quelques heures, semblant perdre contact avec le temps et la réalité. Le soleil commença alors doucement à poindre et la princesse ressenti un brusque sentiment de rappel. L’oiseau de la fontaine lui avait mentionné qu’au lever du soleil elle devrait s’en retourner.

Elle courut aussi vite qu’elle le put d’où elle venait et reconnut l’endroit précis où elle avait ouvert les yeux. Celui-ci baignait dans la lueur du matin juste levé. Elle traversa un doux rayon de soleil et disparut. Quand elle ouvrit à nouveau les yeux, elle baignait nue dans l’eau douce et claire de la fontaine. Elle remercia bien fort l’esprit qui l’habitait et se rhabillant, courut, le cœur battant, palpitant, jusqu’à sa chambre, dans la plus haute tour du château.

Les jours passèrent et elle repensa avec délectation à ses heures perdues et délicieuses, à gambader dans les bois avec pour seule contrainte, le temps imparti. Et la seule idée de pouvoir recommencer suffit à lui redonner le sourire et à retirer toute langueur et mélancolie de son cœur.

Chaque soir, elle raconta son épopée avec enthousiasme à l’oiseau, esprit de la fontaine, sans jamais se lasser. Son seul regret, fut de ne point avoir eu l’occasion d’y croiser le prince. Mais ce serait sans doute pour la prochaine fois, se promettant d’y revenir jusqu’à ce qu’elle l’aperçoive.

C’est ainsi, qu’une fois par mois, à la pleine lune, la princesse sortit en douce du royaume, sous la forme d’une biche d’or, arpentant les bois.

✨✨✨✨✨✨

Un jour, d’un joli mois de mai, arriva la rencontre tant espérée.

Au milieu des feuillages, alors que le matin était sur le point de se lever, un jeune homme et sa monture arpentaient seuls les sentiers. Le cœur de la princesse ne fit qu’un seul tour, tant elle était sûre qu’il s’agissait là, de l’être qu’elle recherchait.

Et apparut sous les traits d’une belle biche dorée, la princesse aux cheveux d’or.

Envoûté par la vision qu’elle avait devant elle, la princesse ne put quitter des yeux le prince, qu’elle trouvait si jeune, si beau et si bien fait, qu’elle n’eut point peur de s’en approcher de trop près, oubliant un instant l’apparence qu’elle revêtait.

Le prince qui n’avait jamais vu d’animal pareil, fut subjugué par la beauté de son être et l’aura qui s’en dégageait, pensant qu’elle devait avoir bien de la valeur et que pareil trophée dans le château du roi lui vaudrait tout les honneurs. Il considéra cette rencontre comme une bénédiction dans sa quête, un cadeau sans doute fait des fées. Il ne pouvait en être autrement. Aveuglé par sa cupidité, il saisit son arc, sans réfléchir un instant et sans penser qu’il s’agissait là, bel et bien de la princesse aux cheveux d’or, décocha une flèche dans sa direction. Le prince, réputé bon chasseur, fit atterrir la flèche en plein dans le cœur et l’animal tomba à terre avec un tel élan de grâce qu’elle en émut presque son chasseur. Ce fut même s’il ne regretta, un instant, d’avoir mis la main sur cette si divine trouvaille. Mais cette pensée s’envola bien vite à celle qu’il avait de la douce princesse aux cheveux d’or, dont il avait tant entendu parler. Il prit l’animal avec lui sur son cheval et se dirigea fièrement, vers le château du roi.

Arrivé devant les grilles de la cour du château, il demanda à voir le roi, affirmant qu’il avait avec lui un cadeau extraordinaire en échange de la main de sa fille. Un valet l’accueillit et il se vit conduire à la salle du trône où l’attendait le souverain. Mais au moment même où il déposa la biche dorée aux pieds du roi, un rayon de soleil perça le ciel, traversa une des grandes fenêtres en arceaux de la salle du trône, jusqu’à atteindre le corps gisant de la bête et la biche d’or disparue, laissant place à la belle princesse aux cheveux d’or, dans une lumière divine, miroitante, qui leur fit presque mal aux yeux.

Le prince devant cette vision, poussa un cri d’effroi : Mon Dieu, s’exclama t-il, qu’ai-je fait ! Quel est donc ce maléfice !

La princesse aux cheveux d’or, malgré la flèche plantée dans son cœur et le sang qui s’en écoulait, était toujours aussi belle.

Sa taille était divine et sa peau était aussi fraîche et délicate que le plus pur pétale de rose blanche. Ses joues avaient gardé leurs teintes rosés des plus belles roses et sa bouche était aussi intense que le plus rouge des boutons de rose rouge, quant à ses yeux, ils gardaient le même éclat brillant, vert émeraude, que la verdure servant d’écrin aux roses.

Le prince qui devant cette désillusion, cru mourir, cru percevoir un instant dans son regard, un délicieux mélange d’amour tendre et de candeur. Certains auteurs se plaisent à raconter, que c’est en croisant son regard, qu’il rencontra pour la première fois, l’amour sincère et véritable, et qu’il eu comprit ce qu’il était vraiment.

– Mon ami, souffla-t-elle, j’ai usé de ce maléfice dans l’espoir de vous voir et rien au monde ne me fit plus plaisir que de combler ce vœu. A présent, je vous dis adieu !

Sur ces mots prononcés, le prince fondit en larmes, conscient de qu’il avait fait.

– Oooh, belle princesse aux cheveux d’or, je m’en veux tellement. Je ne savais pas, pardonnez moi !

On raconte qu’il prononça bien d’autres mots encore, exprimant ainsi sa désolation et que dans un discours qui lui fut long et pénible, il jura solennellement, que jamais plus il ne toucherait son arc, et ne causerait désolation. Son arrogance et son jugement trop prompt à dispenser la mort, lui avait coûté cher et la seule chose qu’il n’avait jamais vraiment désiré.

Mais la princesse, déjà l’avait quitté.

Ses paupières étaient retombées sur ses jolis yeux, dont l’éclat émeraude des pierres les plus précieuses, ne verraient plus. Le prince versa un torrent de larmes, jamais son cœur n’eut autant saigné. On ne su dire d’ailleurs avec exactitude, lequel des deux eut le plus souffert et le prince sentit son cœur se briser dans sa poitrine, comme autant de morceaux de verre qui se brise en tombant, se maudissant pour les temps à venir…

Une larme roula le long de sa joue et tomba sur la poitrine de la princesse, à l’endroit exact où la flèche avait percé son cœur, éclaboussant en scintillant par milles fois sa blessure.

Une lumière éclatante, pure et lumineuse, apparut où fut tombée la larme du prince par mille fois et disparut comme par enchantement la flèche plantée dans le cœur, ainsi que le tout le sang versé. Ce fut comme si rien ne s’était passé, la belle étendue à ses côtés, semblait dormir paisiblement.

Elle ouvrit alors de grands yeux, étonnée, demandant au prince ce qu’il s’était passé. Le prince, abasourdi devant tant de magie, ne put expliquer le charme qui venait de se produire. Il commença à pleurer de nouveau, mais ce fut cette fois des larmes heureuses, de bonheur, de voir ainsi sa chère princesse lui revenir et lui parler.

Un miracle des fées, à n’en plus douter.

On eut dit que ce jour-là, le roi consentit pour la première fois à marier sa fille. L’amour que le prince tint pour la princesse était si fort et véritable, qui l’eut ramené à la vie et ce fut là, le cadeau le plus rare et le plus prodigieux qui lui fut donné de recevoir en échange de sa main.

Les noces furent bonnes et belles et l’on raconte à travers le monde, que jamais on eût rencontré de jeunes gens plus fous d’amour l’un pour l’autre, tant qu’ils ne pouvaient plus se quitter. 

Le prince en rentrant chez lui, accompagné de sa belle, tint sa promesse et se débarrassa de son arc et de ses flèches, qui lui avait causé tant de tort et de malheur. Il ordonna également, à tout son peuple domicilié sur ses terres, que nul autres créatures désormais ne serait plus jamais sacrifiés. Il fit construire à la place un grand jardin dans sa cour, vaste et magnifique, avec des plantes de toutes les nations et origines, petites ou grandes, grâce aux longs cheveux d’or de la princesse, où chacun pouvait y venir manger à sa faim, sans avoir à souffrir de la mort et subir le deuil pour cela.

Ce jour-là, la perte qu’il eut ressenti, avait laissé dans son cœur, une entaille si profonde, que bien que comblé par les joies de sa jeune vie maritale, ne put jamais lui faire oublier la douleur en croyant renoncer à ce qu’il avait de plus cher et tant espéré avec son cœur.

Fin

Les Contes de la Fée Bleue

Fairy Time

 

 

Libre à vous de comprendre ce que vous voulez de cette histoire et d’en tirer les enseignements qu’il vous plaît d’y voir, mais la morale de celle-ci est que chaque vies sur terre, qu’elle soit jugée, (trop promptement sans doute), insignifiante ou de moindre valeur, est précieuse, fruit de l’amour et de la volonté Divine. Ni plus ni moins.

Et que par conséquent, il est important que chacun puisse à sa façon, y voir l’étincelle de vie et le caractère sacré* qui l’anime, que l’on ne mesure que quelques millimètres ou que l’on soit grand comme un géant de pierre.

Toute vie est une vie, vous feriez bien d’y croire, au risque un jour peut-être, de finir le cœur brisé, par bien trop d’orgueil et de fatuité…

 

* Sacré, litt : A qui l’on doit un respect absolu, qui s’impose par sa haute valeur…  Fam : qui revêt une importance primordiale et à quoi il ne faut pas toucher…

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